Attention l’heure tourne pour la caution qui entend se défendre judiciairement !
La caution est désormais enfermée dans un délai raccourci par la loi du 17 juin 2008, portant réforme du régime des prescriptions.
Toutefois, le sort de son action sera différent selon qu’elle se trouve en demande ou en défense.
- Un délai de prescription de 5 ans en demande :
Les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. (Article 2224 du Code civil).
Le Code civil, pose une règle de principe concernant les procédures engagées devant la juridiction compétente pour obtenir le respect ou la reconnaissance d’un droit ou d’un intérêt légitime.
La caution se trouve donc enfermée dans ce délai de 5 ans, lorsque spontanément, elle décide d’assigner son créancier.
De telles actions spontanées portent en général sur des demandes en nullité du cautionnement ou en responsabilité civile pour faute du créancier.
Le garant doit alors prendre garde à bien respecter le délai de prescription, faute de quoi sa demande serait déclarée irrecevable, quel est donc le point de départ de la prescription ?
- Pour les actions judiciaires ou demande reconventionnelles en nullité du cautionnement, régularisé sous seing privé, fondées notamment sur les articles L 341-2 et 3 du Code la consommation ou les vices du consentement, la jurisprudence constante estime que la prescription court à compter de la signature de l’acte de cautionnement. S’agissant d’un vice du consentement, dol ou l’erreur, la prescription court à compter du jour où le vice a été découvert par la victime (CA Chambéry, 27 novembre 2012, n° 11/00822).
- Concernant les actions en responsabilité civile, fondées sur la faute du créancier ou en déchéance du cautionnement, au visa de l’article L 341-4 du Code de la Consommation, ou encore sur l’article 1 326 du Code civil, notamment pour les cautionnements obtenus par acte authentique ; les tribunaux estiment en revanche, que le délai court à compter du jour ou est constaté la défaillance du débiteur principal et l’appel en garantie du créancier à l’encontre de la caution (CA Nancy, 2ème, 5 novembre 2015, 14/02389).
Pour l’ensemble de ces cas, il n’est pas inutile de rappeler que certains actes interruptifs de prescription permettent à la caution de voir rallonger son délai pour agir (article 2 246 du Code civil) :
- La déclaration de créance du créancier à la procédure collective du débiteur principal.
- La mise en œuvre d’une voie d’exécution, telle que la saisie immobilière d’un bien appartenant au débiteur principal.
Attention ! Lorsque que le cautionnement est reçu par acte authentique et que le créancier détient ainsi d’une formule exécutoire, il n’a pas besoin d’obtenir un titre exécutoire en justice pour mettre en œuvre des voies d’exécution contre la caution.
Dès lors, le garant est privé de sa défense au fond puisqu’il ne sera même pas assigné par son créancier.
C’est donc souvent dans cette hypothèse que la caution devra prendre les devants en assignant spontanément le créancier.
La question du délai de prescription se pose alors de nouveau de façon impérieuse.
La caution, hardie, devra donc bien surveiller l’écoulement du délai pour pouvoir agir utilement.
- Imprescriptibilité de la défense de la caution, assignée en paiement par le créancier :
En pratique, les hypothèses de mise en cause du créancier bancaire par la caution de façon spontanée, hors demande en paiement initiale, ne sont pas courantes car le plus souvent, ce n’est qu’une fois que la caution est actionnée en paiement, qu’elle cherche les moyens de s’en défendre.
Les cas les plus usuels demeurent les moyens et griefs excipés au fond en défense ainsi que les demandes reconventionnelles, formulées également en défense.
Si ces dernières sont soumises au régime de la prescription de 5 ans, les griefs et moyens de défense sont en revanche imprescriptibles et échappent fort heureusement à l’article 2 224 du Code Civil.
En effet, résulte de la lettre de l’article 2 224 que seules les actions personnelles ou mobilières ou les demandes reconventionnelles se prescrivent par 5 ans.
L’adage latin « Quae temporalia sunt ad agendum, perpetua sunt ad excipendium » indique d’ailleurs que ce qui est temporaire au regard de l’exercice d’une action en justice est perpétuel au regard de la défense.
La caution n’est donc enfermée dans aucun délai lorsqu’elle se défend en suite d’une action en paiement initiée à son encontre.
La logique est imparable : les moyens et griefs de défense sont imprescriptibles puisqu’ils ne résultent que de la seule volonté du créancier d’assigner son garant.
Si tel n’était pas le cas, plus aucun défendeur ne pourrait utilement se défendre car il suffirait aux créanciers de décaler leur assignation à la veille de l’expiration du délai de prescription pour empêcher qu’un quelconque grief leur soit utilement opposé devant la juridiction, habilement et tardivement saisie.
Tout demandeur pourrait ainsi garantir le succès de ses prétentions et réduire à néant les droits de la défense, le valeureux principe du respect du contradictoire et pire encore, le bon déroulement de la justice.
Ainsi, certains moyens de défense comme la disproportion du cautionnement, soulevée au visa de l’article L 341- 4 du Code de la consommation, supposent nécessairement et préalablement une demande en exécution du cautionnement par le créancier.
Le texte prévoit, en effet, un contrôle de proportionnalité tant au moment de la souscription de l’acte litigieux qu’au moment de l’appel du créancier.
L’appel du créancier est donc le préalable à la mise en œuvre de la démonstration de la disproportion éventuellement soulevé.
La jurisprudence confirme parfaitement cette analyse, ce qui permet que la notion de prescription ne soit pas instrumentalisée à dessein (Cass. Com., 21 octobre 2014, 13-21341).
N’hésitez pas à consulter un avocat spécialisé.
Sabine VACRATE
Avocat
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